Je donne la parole à Nathalie, sage-femme exerçant à PHAM (Premières Heures Au Monde) à Bourgoin Jallieu

Pourriez vous, vous présenter en quelques mots et nous préciser où vous exercez ?

Je m’appelle Nathalie Munsch, diplomée de l’école de Strasbourg de 1991. Je suis SF libérale depuis 2004. Après quelques années de travail en milieu hospitalier, en salle de naissance et dans différents services. Depuis 2006 j’exerce au cabinet de sages-femmes de Chamagnieu (38460). Je propose l’accompagnement global avec accouchement en plateau technique (à Givors de 2010 à 2015, puis à Bourgoin Jallieu depuis octobre2014). J’ai participé à l’ouverture de la maison de naissance PHAM, où j’exerce encore actuellement.

Comment et/ ou pourquoi avez vous eu envie de devenir sage-femme ?

J’ai intégré l’école de sage femme après un petit temps de questionnement, la fac de bio, peut être kiné, la chimie, et pourquoi pas sage-femme ? (ma maman en rêvait- elle secrètement ?). Et c’est au cours de mes études et surtout après quelques années de pratique que j’ai réalisé que j’avais fait le bon choix, et ma pratique ce cesse d’évoluer au fil des années…

Pourquoi choisir d’exercer en Maison de Naissance ?

J’exerce en maison de naissance car je suis investie et engagée pour l’accouchement physiologique et respecté, depuis des années. Je ne me sentais plus à ma place dans le milieu hospitalier. J’ai démarré une activité en cabinet libéral en 2004 (après une petite pause professionnelle suite à la naissance de mon 3ème enfant). J’ai commencé l’accompagnement global en plateau technique en 2010. D’abord à Givors, pendant 5 ans, puis depuis octobre 2014 à Bourgoin Jallieu (j’ai participé à l’ouverture de ce nouveau plateau technique). Je me suis ensuite beaucoup investie pour la création de PHAM en 2016 et j’y travaille depuis son ouverture. C’est pour moi une évidence d’accompagner les familles en maison de naissance.

Comment définiriez vous votre rôle/ votre place pour les couples que vous suivez ?

Pour les couples que j’accompagne, j’accorde beaucoup d’importance à « l’accompagnement global ». Je pense qu’il est très important de tisser une relation de confiance tout au long de la grossesse avec le couple, de les connaitre, de parler de leurs attentes, leurs souhaits, leurs espoirs, leurs craintes et leurs peurs… de laisser au père la place qu’il souhaite prendre. Le jour de la naissance cela facilite le lâcher prise, la mise en place du processus physiologique de la naissance. Etre là, attentive et bienveillante en laissant le maximum de liberté tout en guidant, soutenant et rassurant.

L’organisation du travail à PHAM, en plus du cabinet n’est pas toujours simple. Depuis l’ouverture de PHAM, je fonctionne en binôme avec une autre sage-femme. L’organisation a changé plusieurs fois du fait de plusieurs congés maternités (eh oui les sage-femmes aussi font des bébés, enfin… du moins les jeunes… !) On se partage les astreintes tout au long de l’année, de façon à se remplacer lorsque on a des impératifs. Nous avons un planning régulier la semaine, et en général un week-end sur deux et pendant nos vacances d’été.

Nous sommes aussi de temps en temps sage-femme 2. C’est la deuxième sage-femme qui vient en renfort pour être toujours 2 à chaque naissance. Les patientes sont vues par leur sage-femme référente pour le suivi médical de grossesse et elles voient l’autre sage-femme du binôme à partir du 6è mois. Cela peut être en entretien, en préparation à la naissance et pour une consultation en fin de grossesse.

Le jour J, chaque couple sait qui il doit appeler. Pour moi cela devient alors la priorité sur tout le reste (rendez-vous cabinet, perso, sommeil ou loisir), c’est à dire toujours avoir son téléphone sur soi, chargé, et de l’essence dans sa voiture etc… et être prête à partir à toute heure du jour et de la nuit, pour une durée absolument inconnue (il m’est arrivé de rentrer 2 jours plus tard). Pendant ce temps où plus rien d’autre ne compte que d’accompagner cette maman, ce papa, ce bébé qui naît, je donne sans compter… ma présence, mon énergie, mes compétences, rester vigilante tout en rassurant, accompagner et encourager jusqu’au bout, en confiance.

Comment vous organisez-vous au quotidien ? (routine, astreinte, difficultés, conciliation avec la vie personnelle)

Actuellement, nous manquons de sage-femmes pour faire suffisamment de binômes, depuis septembre 2018 je suis donc en binôme avec 2 SF. Aurélie, avec qui je continue à fonctionner comme depuis le début et Laurine avec qui nous avons mis une autre organisation en place. Le suivi est partagé en faisant chaque mois les consultations en alternance avec l’une puis avec l’autre des 2 sage-femme, les séances de préparations en couple sont partagées également, et nous faisons 2 séances en groupe à PHAM l’une au 5è mois et l’autre au 7è mois, en présence des 2 sage-femmes. Pour l’accouchement les astreintes fixes (d’environs 48h la semaine et 1we/2) sont partagées entre nous.

Pour ma part, j’ai peu de contraintes familiales car mes enfants sont grands et autonomes (ou presque !). Mon mari me soutien et est très compréhensif devant l’urgence, l’imprévu et l’inconstance de cette façon de travailler. Mais quelque fois ça nécessite une grande abnégation et cela peut perturber l’organisation personnelle, familiale et privée.

Cela a permis d’accepter plus de familles mais le rythme est dense, trop dense pour moi depuis des années et le corps a dit stop. Une nouvelle organisation va donc encore devoir se mettre en place …

Quel est votre meilleur souvenir ou expérience de votre vie de sage-femme ?

Des souvenirs de naissances merveilleuses, où on sent cette puissance de la vie, où on est dans une autre dimension, ce moment de la rencontre entre un bébé qui vient au monde et ses parents. Quand le temps est suspendu… oui il y en a plein ! Cela me nourrit et me ressource. Je ne pourrais plus être sage-femme autrement. Certains sont arrivés très vite, d’autres très lentement, d’autres de manière inoubliable : Lorelei (telle la sirène qui a glissé dans l’eau), Joseph (la force tranquille), Manoé (le bébé venu des étoiles), Bosco et Séléna (né(e) entièrement dans leur poche) ,Merlin et Johann (farceurs), Gabin ( surprenant), Emmie (sur la voix magique de l’Ave Maria), plusieurs fratries aussi …et tant d’autres encore… Mais ce qui me fascine aussi toujours, c’est cette puissance de la mère qui enfante, cette force intérieure, cette confiance en la VIE… !

Que vous souhaitez-vous pour l’avenir ?

Pour l’avenir, je souhaite trouver le bon équilibre pour moi. Pouvoir continuer à accompagner les familles et à accueillir les bébés dans le respect de la physiologie et en privilégiant cette dimension affective, sans que ça pèse trop sur mon corps, ma fatigue, ma vie personnelle. Je souhaite que l’on soit plus nombreuses à œuvrer dans cette voie pour que la charge soit partagée. Je souhaite que l’on soit aidées sur le plan administratif, financier aussi (pour pouvoir en vivre sans avoir besoin du cabinet en plus et sans avoir à demander de dépassements d’honoraires aux familles). Bien sûr je souhaite la pérennité des maisons de naissance, dont l’organisation s’améliorera au fils du temps j’en suis sûre.