Les Maisons de Naissance, un truc de hippie?!

hippie

Lorsque je parle des maisons de naissance autour de moi, je me heurte fréquemment à des idées reçues, qui se résument en deux mots : sécurité et hippie. Deux préjugés qui méritent d’être questionnés, afin de comprendre de quel schéma notre société a hérité en matière de naissance et à quel point il est question de choix, plus que d’excentricité.

Dépassionner la question de la sécurité

La question de la sécurité est la première crainte brandie par les personnes qui méconnaissent les règles d’un accouchement en maison de naissance. Elles s’en font une vision très médiévale, où la parturiente serait au mieux livrée à elle-même, au pire à sa seule bonne étoile !

La question de la sécurité est parfaitement légitime et elle est surtout assez simple à évacuer. En effet, il y a beaucoup de réponses à apporter à ces interrogations : la réalité des transferts, la surveillance de la grossesse, la présence accrue des sages-femmes (plus disponibles qu’en structure hospitalière), les études sur le sujet effectuées à l’étranger (là où on dispose de davantage de recul sur la pratique des maisons de naissance).

Il ne sera jamais question de convaincre, puisque le lieu de son accouchement doit demeurer un choix individuel, mais il est assez simple de rassurer sur la sécurité, en se basant sur des données factuelles.

Un accouchement hippie : c’est quoi au juste ?

La seconde idée reçue concernant l’accouchement en maison de naissance (et certainement aussi l’accouchement à domicile) est plus culturelle : elle consiste à dire, en somme, qu’accoucher hors d’une structure hospitalière est un truc de hippie ! Cette vision de l’accouchement peut être considérée comme une simple idée reçue ou une opinion qui ne nuit à personne, si ce n’est aux gens qui manquent d’informations sur le sujet. Elle ne devrait théoriquement pas entraver le choix des femmes qui souhaitent accoucher en maison de naissance. Or cette image culturelle autour de l’accouchement physiologique, incluant encens, chants ethniques, conservation de son placenta, nudité et femme qui hurle sauvagement, est extrêmement limitante. Elle empêche une certaine ouverture de la société française vers des modèles d’accouchement qu’il convient encore de nommer « alternatifs ».

La « menace » du retour à l’animalité

Il reste intéressant de questionner ces images liées à la nature et à l’animalité, d’abord pour comprendre leur origine mais aussi pour les démystifier. Je suis sûre que l’on a tous l’image de cette femme, le ventre tendu, accroupie sous un arbre, peut-être entourée d’autres femmes, qui s’apprête à enfanter par elle-même, sans assistance médicale, convaincue de sa puissance ou simplement ramenée malgré elle, dans ce processus datant de plusieurs millénaires, à une réalité biologique qui l’accapare tout entière.

Comprendre le comportement d’une femme accouchant physiologiquement

Par le jeu des hormones, la naissance est un moment intime et naturel qui pousse la femme à se départir de certains attributs sociaux. Son attention, son comportement, sa façon de communiquer avec son environnement, ses émotions, tout est bouleversé. Elle a besoin de se laisser emporter dans ce tourbillon physique, psychique et émotionnel. Elle va souvent se dévêtir, pour prendre une douche, un bain, puis oublier de se rhabiller. Elle va souvent avoir besoin de faire du bruit, pas nécessairement des cris, mais des sons, qui peuvent ressembler à des chants.

La femme en train d’accoucher va chercher à adopter la position dont son corps et son bébé ont besoin pour coopérer au mieux. Cela signifie qu’elle va très souvent se retrouver accroupie, à quatre pattes, suspendue, … C’est évidemment bien éloigné de l’image d’Épinal de la parturiente télévisuelle ou des manuels de biologie, à l’accouchement guidé et aux pieds dans les étriers, en chemise blanche d’hôpital. Cela peut donc surprendre. Pourtant, il n’y a rien de choquant (ni de hippie) à œuvrer de concert avec son propre corps pour permettre le cheminement d’un bébé hors de son ventre.

C’est effectivement un regard « mammifère » qu’il faut alors poser sur la mère en train d’accoucher physiologiquement, sans que le terme ne soit péjoratif. Il serait intéressant d’arriver à poser un regard neutre sur cet état instinctif, absolument nécessaire à l’enfantement, lorsqu’on accouche physiologiquement.

Il est toutefois normal que l’accouchement physiologique ne convienne pas à toutes les femmes, à tous les couples. C’est la raison pour laquelle le panel de choix d’accouchements doit être aussi large que possible dans chaque pays.

Spiritualité : l’arbre qui cache la forêt de la liberté d’accoucher

La maison de naissance a également la particularité d’offrir un espace d’accouchement que les parents peuvent investir à leur guise. Cette grande liberté quant à l’atmosphère des lieux a pour but de recréer un environnement où la parturiente se sente suffisamment en confiance pour favoriser une bonne progression du processus d’accouchement. L’ambiance se veut tamisée, feutrée… et certains couples peuvent effectivement y ajouter la musique de leur choix. Comme dans tout vécu privé, les prières peuvent trouver leur place si elles ont une fonction pour la famille concernée.

Il me semble important d’éviter de stigmatiser les choix de confort (à connotation spirituelle ou non) que peuvent faire les parents, quand cette liberté d’ambiance devrait plutôt être la norme. Le cocon ainsi créé bénéficierait aux parturientes, quel que soit le milieu où elles accouchent, tant que les recommandations médicales en matière d’accouchement sont respectées.

Construire une vision de l’accouchement basée sur le choix et non sur la peur

J’ajouterais que caricaturer ou véhiculer des images erronées d’un type d’accouchement a l’effet pervers de priver certaines femmes d’une alternative qui pourrait leur convenir, parce qu’elles ne se reconnaîtraient pas dans l’archétype supposé de la femme accouchant en maison de naissance. Or, toutes les femmes qui le souhaitent, quel que soit leur milieu social, âge, religion ont le droit à la même offre de soin. En matière d’accouchement comme d’autres sujets, évitons les idées limitantes !

De même qu’il n’y a pas de modèle type de femme accouchant en maternité ou en clinique, séparons les usages privés des structures accueillant les parturientes. Les maisons de naissance ne doivent pas rester une offre anecdotique dans le paysage médical.

Article co-écrit par Amandine et Debohra

3 réflexions sur « Les Maisons de Naissance, un truc de hippie?! »

  1. Encore une fois nous ne pouvons que constater que pour les sages-femmes qui acceptent d’accompagner et pour les femmes qui font le choix de l’accouchement accompagné à domicile les problématiques, les résistances et les critiques à priori sont les mêmes que pour les maisons de naissance alors que nous disposons d’enquêtes internationales et maintenant nationales pour prouver la pertinence de ces choix …

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